« Certains lieux et demeures ont une forte personnalité, indépendamment de leurs habitants ; peut-être, comme certains hommes, jettent-ils délibérément un sort à ceux qui s’apprêtent à les aimer et à les chérir. Menabilly était l’une de ces maisons où, par endroits, l’épaisseur du temps semble s’être usée et laisser apparaître le passé. On avait l’impression que certaines pièces avaient leur vie propre, qui reprenait aussitôt après le départ de l’intrus. »
Daphné du Maurier
Les Cornouailles anglaises m’évoquent Daphné du Maurier, à qui une de mes filles doit son si beau prénom Rebecca, et les incontournables Cornish pasties, un plat national tant il est lié à l’histoire de cette région.
Histoire des Cornish pasties
(« Oggie » vient de « Hoggan », mot employé par les vendeurs de rues pour interpeller les passants).
« Oggie, Oggie, Oggie » braillent aux mineurs les Bal Maidens (jeunes femmes qui travaillaient dans les mines en surface).
En réponse, les mineurs répondent « Oi, Oi, Oi! ».
Vous pouvez le réentendre de nos jours dans les stades de football ou événements sportifs.
Ces petits chaussons servaient de déjeuner aux mineurs et fermiers des Cornouailles. Très facilement transportables, ils pouvaient se glisser dans les poches.
Les premières traces de Cornish pasty remonteraient au XIIIe siècle. Le plat est devenu populaire au XVIIe et au XVIIIe siècle.
Au XVIIIe, ils étaient composés essentiellement de pommes de terre, de rutabaga ou d’oignons. La viande est venue se rajouter plus tard.
Les vrais, les authentiques chaussons doit avoir la forme de D, sont impérativement composés de pommes de terre, d’oignon, de rutabaga et de bœuf braisé. La pâte au saindoux (graisse de porc) se doit d’être robuste. Le carnet des charges est strict. Les Cornish pasties ont obtenu le titre d’indication géographique protégée.
La croûte épaisse des bords avait son utilité en son temps ; elle servait à tenir le chausson entre les mains sales, sans contaminer le repas et éviter l’empoisonnement à l’arsenic en particulier. Ce poison accompagnait couramment l’étain dans le minerai.
Les croutes étaient laissées aux Knockers, des nains du folklore minier (« Ils attirent les mineurs vers les galeries riches en minerai en frappant les parois des galeries à l’aide de leurs pioches. Ils ont aussi un rôle protecteur en avertissant ces derniers d’un danger imminent).
Comme avec beaucoup de symboles culturels britanniques, il y a des superstitions et des croyances entourant l’humble chausson des Cornouailles.
Il aurait été dit que le diable, après avoir entendu l’incantation des femmes des Cornouailles de transformer n’importe quoi en garniture savoureuse, ne traverserait jamais le fleuve Tamar en Cornouailles de peur de terminer en farce à chaussons.
La Recette
La Recette
Entre nous, vous pouvez ajouter un soupçon de curry en poudre, de paprika ou de la sauce Worcestershire aux légumes et à la viande, mais attention, ne le criez pas sur tous les toits. On ne plaisante pas avec les traditions.
Dans cette recette ci-dessous, les légumes sont taillés très finement à la mandoline pour fondre littéralement à la cuisson. Rien de pire que des légumes pas assez cuits.
Ustensiles : Une mandoline + Une assiette de 24 cm de diamètre
Ingrédients pour 5 beaux chaussons
Temps : 1 h de préparation + 50 minutes de cuisson
Pâte au Saindoux pu Pâte au suet
450 g de farine bio T80
½ c à café de sel
115 g de saindoux froid, coupé en morceaux
75 g de beurre froid, coupé en morceaux
Eau froide
1 œuf battu
Garniture
1 oignon pelé et émincé finement
120 g de rutabaga pelé et coupé en fines lamelles
1 grosse pomme de terre pelée et coupée en fines lamelles
400 de bœuf cuit, restes de pot-au-feu, coupé en petits morceaux
50 g de beurre
Sel et du poivre
Méthode
Suet Pastry ou pâte au saindoux
- Mélanger dans un grand saladier la farine et le sel.
- Ajouter le beurre et le saindoux.
- Les enrober de farine. Le mélange doit être sableux.
- Verser de l’eau froide jusqu’à obtenir une pâte.
- La pétrir rapidement, la filmer et l’entreposer au réfrigérateur au moins 30 minutes.
La garniture des Cornish Pasties
- Diviser en cinq les morceaux de bœuf, les lamelles de pommes de terre, de rutabaga, les oignons, le beurre.
- Disposer les ingrédients devant vous, sur votre plan de travail avec le sel et le poivre.
- Préchauffer le four à 200 °C.
- Sortir la pâte du réfrigérateur et la diviser en cinq portions.
- Étaler une des portions, sur une surface farinée, en un grand cercle de 24 cm de diamètre et de 3 mm d’épaisseur. Aidez-vous de l’assiette.
- Sur la moitié du cercle et à un bon cm des bords, disposer une couche de lamelles de pommes de terre, saler, poivrer, ajouter quelques oignons, une couche de rutabaga et le bœuf cuit. Terminer par le beurre.
- Badigeonner d’œuf battu les bords et rabattre l’autre moitié de pâte.
- Presser les bords puis les retourner en les pinçant.
- À l’aide d’un couteau, inciser deux petits trous pour laisser la vapeur s’échapper.
- Disposer sur une plaque au four.
- Répéter l’opération avec le reste de pâte.
- Badigeonner d’œuf battu les chaussons.
- Enfourner pendant 20 minutes ensuite baisser à 160° C durant 30 minutes.
Servir les Cornish pasties chauds ou froids avec une salade et une petite gravy.
16 Comments
Merci pour l’historique fort intéressant . C’était,hélas, une époque plus que pénible,car le métier de mineur était TRÈS dur et dangereux Bisous Chris 06
Oui très pénible Chris.
j’aime bien ces recettes qui ont une histoire et qui en plus sont très appétissantes!!!! bisous
merci Sotis.
Merci pour cet historique. Je savais qu’avant ils étaient tenus par la croute mais je ne savais pas pourquoi 🙂
Mais de rien Anna.
Daphné du Maurier, j’adore moi aussi…
Ces chaussons sont vraiment très appétissants, merci du partage.
Bise!
Bonjour encore merci pour cette recette anglaise et son histoire. Petite question: le saindoux revient souvent dans les recettes anglaises dans la confection des pâtes (à pie, chausson…) notamment.Peut -on s’en passer ? qu’apporte le saindoux aux recettes ?
merci
Le saindoux apporte une texture et un goût à la pâte mais Marlène, vous pouvez le remplacer par du beurre.
You’re welcome 😉
L’histoire est aussi savoureuse que les pasties 🙂
merci ! cela me rappelle mon premier séjour en Angleterre, en Cornouaille, à Camborne ! c’était … il y a 46 ans. Les personnes chez qui je résidais ont été mes grand-parents anglais. Ils étaient retraités. Lui, Harry, avait été mineur dans les mines d’étain, j’avais tellement de mal à comprendre son accent… Elle, Fern, était une délicieuse petite dame avec qui j’ai passé beaucoup de temps à bavarder. Côté cuisine, j’ai quelques souvenirs mitigés… Dans l’excellent, les Cornis pasties, oh oui ! Sinon… les beans on toast au petit déjeuner, je n’ai pas pu… Ni le poulet bouilli à la sauce menthe…
Je suis contente de pouvoir leur rendre hommage si longtemps après !
Hello
A propos des Welsh Oggies, pour la pâte, même si ça va vous arracher des cris d’effroi, peut-on remplacer le saindoux par de la margarine ou simplement du beurre ?
Autre horreur, peut-on simplement utiliser une pâte à tarte du commerce ? Brisée ou feuilletée ?
Yours
Serge
Bonjour Serge,
Je ne suis pas une puriste. Forcement le saindoux donne du croustillant à la pâte mais oui, bien évidemment vous pouvez le remplacer par du beurre, de la margarine et même utiliser une pâte brisée du commerce. Par manque de temps, ça m’arrive de temps en temps.
Belle journée à vous